Face à la menace récurrente de l’antibiorésistance, de nouvelles stratégies thérapeutiques sont aujourd’hui indispensables pour lutter contre les infections microbiennes.
Face à la menace récurrente de l’antibiorésistance, de nouvelles stratégies thérapeutiques sont aujourd’hui indispensables pour lutter contre les infections microbiennes. Une nouvelle approche consiste à utiliser des molécules issues de la pharmacopée naturelle, c’est-à-dire dérivées de plantes médicinales utilisées par exemple dans la médecine traditionnelle chinoise. Les propriétés antimicrobiennes de ces molécules ont été récemment étudiées par des chercheurs de l’Institut Pasteur.
Les infections microbiennes sont un problème de santé majeur auxquelles sont confrontés les pays émergents et industrialisés. En réponse à la résistance croissante des pathogènes aux antibiothérapies actuelles, des approches alternatives ou complémentaires sont aujourd’hui nécessaires. Une nouvelle stratégie thérapeutique ne ciblant plus la croissance du pathogène mais son environnement et stimulant les défenses immunitaires innées de l’hôte permettrait de prévenir et résoudre plus rapidement des infections contre un large spectre de microorganismes, incluant bactéries, virus et champignons. Dans ce contexte, l’unité de Pathogénie microbienne moléculaire de l’Institut Pasteur s’est intéressée aux molécules immuno-modulatrices. De telles molécules sont capables :
- d’induire l’expression des peptides antimicrobiens, c’est-à-dire des antibiotiques naturellement produits par les épithéliums de l’homme, ces tissus recouvrant les cavités internes de l’organisme ;
- de limiter la sécrétion de substances pro-inflammatoires, afin de préserver l’intégrité des muqueuses.
Trois molécules issues de plantes médicinales
Par criblage d’une banque de composés naturels, « nous avons identifié trois molécules issues de plantes médicinales qui induisent sélectivement la transcription du gène codant la bêta-défensine-3, un des peptides possédant le plus large spectre d’activité antimicrobienne », explique Brice Sperandio de l’unité de Pathogénie microbienne moléculaire de l’Institut Pasteur. Ces molécules sont issues de trois plantes, décrites ci-dessous.
- L'andrographolide (un diterpénoïde labdane) est le principal composé actif d’Andrographis paniculata, plante connue aussi sous les noms de roi des amers ou chirette verte, native de l’Inde et du Sri Lanka, utilisée pour traiter la fièvre.
- L'oridonine (un diterpénoïde purifié) est issu de Rabdosia rubescens, une plante que l’on retrouve en Chine et en Asie de l’Est, utilisée dans le traitement de certains cancers pour ses propriétés bloquant la croissance de nouveaux vaisseaux sanguins.
- L'isoliquiritigénine (un flavonoïde) est présent dans la racine de Glycyrrhiza glabra, nom savant de la réglisse, trouvée couramment en Europe et en Asie, et utilisée pour ses vertus anti-inflammatoires.
Une efficacité contre des pathogènes connus
Par une analyse systématique, les chercheurs ont déchiffré le mécanisme moléculaire supportant l’induction de ce gène après traitement de cellules épithéliales intestinales par ces molécules et montré une augmentation de leur pouvoir bactéricide et bactériostatique contre des pathogènes tels que Listeria monocytogenes, Salmonella enterica et Pseudomonas aeruginosa.
Ces travaux démontrent l’existence de molécules pharmaco-actives issues de plantes utilisées par la médecine traditionnelle chinoise capables de stimuler les défenses antimicrobiennes humaines.